Grande-Rue

 

Située dans le centre-ville, la Grande-Rue relie les rues de Fresnay et Saint-Blaise. Alençon doit probablement sa naissance, vers le IVe siècle, à l'intersection d'une route commerciale, unissant l'Espagne et l'Angleterre par le Maine et la Normandie (empruntant les rues du Mans, du Bas-de-Montsort, de Sarthe et de la Grande-Rue) et de la rivière la Sarthe sur laquelle un gué a été agencé près du pont de Sarthe.

Cette voie fut sans doute aménagée par Guillaume Ier de Bellême.

Constituant l'artère principale de la ville au Moyen Âge, reliant les portes de Sées et de la Barre, elle est appelée, comme la rue du Château, rue Notre-Sire-le-Comte en 1282, Le-Conte en 1297, Monsieur-le-Duc et Monsieur-le-Prince, du nom de ses seigneurs. La Grande-Rue, qui sera élargie entre 1752 et 1756, est attestée en 1364 sous sa forme actuelle. En 1596, la section qui va du pont du Guichet (attesté en 1204 et placé approximativement à l'intersection avec la rue De-Lattre-de-Tassigny, au voisinage du confluent de la Sarthe et de la Briante) au quartier Saint-Léonard, est appelée rue du Pont-du-Guichet-aux-Étaux. Quant au tronçon menant au cours Clemenceau, il est désigné rue du Pont-du-Guichet-à-la-Porte-de-Sées, puis rue de la Porte-de-Sées par le cadastre de 1811, en souvenir d'une porte monumentale, flanquée de quatre tours, démolie en 1791. Sur le plan de 1827, cette section porte la même appellation qu'aujourd'hui.

Signalons les balcons des immeubles du XVIIIe siècle portant les n°s 1 et 11 ; le n° 6, avec ses balcons, ses linteaux, ses chapiteaux, sa corniche, son fronton curviligne et ses lucarnes, construit en 1858 ; les n°s 12 à 32 qui offrent des façades typiques d'Alençon, du XVIIIe siècle, ornées de balcons en fer forgé et dont la première et la dernière présentent des niches vides ; et la façade recouvertes d'essentes du Petit Nègre, maison à pignon avec étages en surplomb, des XVe-XVIe siècles, au n° 37. Le n° 38 est une ancienne entrée de cour qui donnait accès au tribunal de commerce.

La maison n° 44 occupée aujourd'hui par une pâtisserie, à l'angle de la rue du Bercail et de la Grande-Rue, face à la basilique Notre-Dame, conserve les caractères d'une construction du XVe siècle sous sa façade rénovée. Elle fut donnée au trésor de Notre-Dame le 24 juillet 1501 par Jehan de Pilloys, sieur de Montigny. Dans les années 1506-1518, elle sert "d'ouvroueret de cabaretz", c'est-à-dire d'atelier et de boutique. On peut donc penser qu'elle était utilisée comme lieu de travail par les tailleurs de pierre, les menuisiers, les maçons et autres ouvriers employés aux travaux de l'église et qu'ils y prenaient leurs repas.

Les immeubles suivants sont du XVIIIe siècle. Les n°s 52-54 se remarquent par leurs balcons et le 57 par son pan de bois. C'est au n° 61 que Louis Javouhey, parent d'Anne-Marie Javouhey, s'installe comme pâtissier en 1885. La demeure portant les n°s 63 à 67, à l'angle de la rue de la Poterne, se distingue par sa cheminée d'angle, ses pilastres, ses consoles, ses chapiteaux et ses deux petites niches dont l'une abrite une statuette.

En 1768, le carrefour avec la rue aux Sieurs était appelé le carrefour du Puy-à-Balancier ou du Puits-à-Branle.

La partie de la Grande-Rue située entre ce carrefour et l'église Saint-Léonard est bordée de constructions présentant un intérêt architectural, aux belles façades de granit avec de jolis balcons en fer forgé. Parmi les édifices remarquables, mentionnons le n° 76 daté de 1860 ; le 77 avec sa façade en pierre, ses pilastres, ses encadrements, ses tableaux de baies sculptés et ses moulures ; l'enseigne de la charcuterie du 79 qui proclame sous forme de rébus "C'est bon depuis les pieds jusqu'à la tête" ; le 81 avec sa façade en pans de bois ; l'ex-porche du 83 qui donnait accès à l'établissement des religieuses de la Providence ; le 109 avec sa belle lucarne en bois et les balcons du 111. C'est au n° 118, que Jacques Hébert, le fameux révolutionnaire fondateur du journal Le Père Duchesne, est né le 15 décembre 1757. Les deux fenêtres sont dotées de linteaux à double accolade et écus. Marcel Leboucher, qui fut maire de la commune libre de Montsort, est né le 22 avril 1893 au n° 119. Les maisons 123 à 127 sont inscrites à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis le 24 juin 1975. Celle du 123, de la fin du XVe siècle, possède une porte surmontée d'un linteau à accolade et écu ; sur sa façade en pans de bois avec encorbellement, on peut voir un écu avec un monogramme sculpté représentant des initiales et une clé, peut-être l'emblème d'un serrurier.

Sur la façade voisine, une statue ancienne, qui a été l'enseigne d'un antiquaire, regarde les passants. Les n°s 135-137, du XVe siècle, avec une grosse poutre moulurée, sont en pans de bois et briques avec encorbellement, et la porte du 137 est agrémentée d'un arc en accolade et écusson. Autrefois, les maisons étaient munies de galeries ou d'auvents, appelés "porches", protégeant les badauds de la pluie ou du soleil, comme celui du n° 150, des XVe-XVIe siècles, avec trois arcades à gros piliers ronds en granit. Il y en avait aussi aux n°s 152-154. Ces porches furent démolis vers 1750. Les immeubles 153-157 sont pourvus de balcons et le premier possède une belle porte à petits panneaux Louis XIII ; le 156 est du XVe siècle , le 158, du XVIe, possède une lucarne, une terrasse couverte et un balcon en fer ; le 163, une tour d'escalier octogonale du XVe siècle et, au n° 171, une Vierge domine le carrefour des Étaux.

 

 

 

 

 

 

Extrait du Dictionnaire des rues et monuments d'Alençon (Alain Champion, Éditions Cénomane, 2003).