Hôtel de ville

L'hôtel de ville actuel est au moins le cinquième édifice affecté à l'administration municipale. En 1444, Alençon possédait déjà un hôtel de ville, souvenir de l'ancienne commune fondée, dit-on, par Guillaume III premier comte d'Alençon, mais on en ignore son emplacement. Cette mairie, disparue pendant l'occupation anglaise, est rétablie par Louis XI en 1473 et installée dans une maison située dans la rue aux Goguets (rue de l'Ancienne-Mairie) qui subsiste jusque vers 1650, date à laquelle elle est transférée place du Palais dans une maison bâtie en 1587. En 1728, un quatrième bâtiment, dont la première pierre est posée par l'intendant Louis Lallemant, est bâti près de l'ancien palais de justice qui s'élevait sur l'emplacement de l'hôtel des postes et c'est en 1783 qu'est posée la première pierre de l'actuel hôtel de ville.

Élevé par l'architecte Jean Delarue, il est bâti sur l'emplacement d'une partie du château. C'est en 1790 que l'administration municipale s'installe dans l'édifice dont le campanile est achevé en 1797.

L'hôtel de ville est une construction en pierres de taille d'un équilibre classique, de style Louis XVI. Le bâtiment s'incurve avec élégance en un arc de cercle et la façade, soutenue par des pilastres, est empreinte d'une grande noblesse. Elle est surmontée d'un fronton rectangulaire et de balustrades évoquant le Petit Trianon. À l'intérieur, l'escalier retient le regard et la salle du conseil municipal, avec son lustre de style Directoire, est remarquable. Les boiseries d'un salon de la fin du XVIIIe siècle sont des objets d'art classés et la façade de l'édifice est inscrite à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques.

Une gravure sur bois de Pierre Godard a été publiée en 1787 dans les Mémoires historiques sur la ville d'Alençon et sur ses seigneurs de Joseph Odolant-Desnos. Selon Robert du Mesnil du Buisson, elle nous montre que l'hôtel de ville n'est pas exactement ce qu'il a été jadis ou ce qu'il devait être. Ce dessin a été reproduit en 1810 dans l'Annuaire statistique historique et administratif du département de l'Orne, avec la mention : Cette gravure représente l'hôtel de ville d'Alençon ainsi qu'il était avant la Révolution. De cette note, on peut conclure que les contemporains de Joseph Odolant-Desnos ont vu l'hôtel de ville tel qu'il est ici représenté, qu'en 1810 il n'avait plus cet aspect et qu'enfin le changement eut lieu pendant la Révolution. Malgré ce témoignage précis, il serait cependant téméraire d'affirmer que tout le plan arrêté par Jean Delarue ait été réellement réalisé. En effet, certains changements sont survenus : le fronton rectangulaire, au-dessus de la partie centrale, portait sur le bandeau du milieu Rege Patriae, c'est-à-dire "Donné par le roi à la Patrie". On a remplacé cette inscription par un faisceau de drapeaux, au milieu duquel on a mis l'horloge qui, on va le voir, était primitivement au-dessus. Sur les côtés, on notait deux médaillons ovales sous des guirlandes, au-dessus desquels se trouvaient deux groupes sculptés dans le goût du XVIIIe siècle, constitués chacun de deux amours. On y a mis les armoiries alençonnaises en 1920. Il eut d'ailleurs été plus conforme à la tradition historique de sculpter ces armes d'un côté et de l'autre, celles des ducs d'Alençon, comme on le voit dans la vignette de l'ouvrage de Joseph Odolant-Desnos. Au milieu de la façade au-dessus du bandeau, on trouvait dans un cartouche le blason de la France en ovale bombé surmonté de la Couronne royale fermée et, des deux côtés, s'étalaient des cornes d'abondance. Cet ensemble fut également détruit en 1792. Nous en arrivons à la pyramide tronquée aux arêtes incurvées qui supporte le campanile. Dans le dessin de Pierre Godard, elle est surmontée d'un petit arc formé par la corniche supérieure. Au-dessous, se trouve l'horloge, posée en 1795, encadrée d'une draperie sculptée. Le seul ornement, sur les côtés, consiste en quatre courtes guirlandes tombantes.

Vers 1810
Vers 1974

 

L'agencement actuel est différent bien que les lignes générales aient été respectées : une fenêtre en demi-cercle, garnissant le milieu à la place de l'horloge, est encadrée d'un bandeau horizontal tandis que le corps même de la pyramide est orné de guirlandes. Mais il manque à celle-ci, dans le haut, deux ou trois assises de pierre et la corniche. Cette dernière a été remplacée par un entablement de bois garni de zinc. Au-dessus, le lanternon est couronné d'un petit dôme surmonté d'un drapeau en fer. Tout différent était le campanile octogonal avec ses baies cintrées, sa corniche et son toit, dont les arêtes suivaient les courbes de la pyramide. Le sommet était formé par la couronne ducale ; au milieu s'élevait une colonne corinthienne fortement vers le bas qui soutenait un aigle.

Notons pour terminer que les toits de l'édifice ont subi, eux aussi, quelques avatars. Le côté nord a été abaissé et le côté sud a été chargé de lucarnes et de cheminées. Enfin, il faut savoir qu'à l'origine, l'hôtel de ville ne comportait que la partie centrale. Ce n'est qu'en 1839 et en 1854 que les ailes nord et sud, qui appartenaient à des particuliers, ont été acquises par la municipalité. Restauré à partir de 1997, l'hôtel de ville à été inauguré en 1999.

Extrait du Dictionnaire des rues et monuments d'Alençon (Alain Champion, Éditions Cénomane, 2003).