Dentelle et Point d'Alençon

Historique

La mode de la dentelle, qui apparaît au XVIIe siècle, donne à notre ville une renommée universelle.

C'est avant même les premières grandes civilisations qu'il faut placer les débuts de la broderie. Cette activité née en Asie, gagne d'abord l'Égypte, la Grèce et l'Italie.

À la fin du XVe siècle, Alençon paraît travailler à divers genres de broderies. Nous savons qu'en 1492, Marguerite de Lorraine fit don à l'église Saint-Léonard d'un "manteau de broderie"et c'est par Marguerite d'Angoulême que notre ville semble avoir connu le point-coupé, introduit en France par Catherine de Médicis qui avait reçu le duché d'Alençon en 1559. Ces deux princesses, en effet, vécurent ensemble à la cour de 1533 à 1549

Au milieu du XVIIe siècle, Alençon constitue un centre industriel remarquable et presque toutes les familles de notre ville participent à l'ensemble des travaux à l'aiguille. C'est à partir de 1650 que Mme La Perrière imite et perfectionne le Point de Venise, créant ainsi la dentelle qui, à partir de 1656, est désignée sous le nom de Point d'Alençon. Sa production emploie environ neuf cents dentellières, réparties en de multiples entreprises particulières, soit environ le dixième de la population, proportion qui donne une idée de l'activité industrielle qui règne à cette époque dans l'art dentellier alençonnais.

Mais la suprématie de la dentelle italienne détourne l'argent de France au profit de l'Italie. C'est pourquoi, en 1665, Colbert fonde dans notre cité une manufacture chargée de produire du Point de France, imposant un monopole de dix ans, interdisant les entreprises individuelles et obligeant les dentellières à travailler à la manufacture. Par ailleurs, l'importation de dentelles étrangères est prohibée. Ce monopole, évidemment mal accepté, est si combattu qu'en 1675 il n'est pas renouvelé.

Au siècle suivant, l'industrie dentellière connaît une prospérité remarquable et celle-ci permet à Thomas Mercier de fonder la fabrique du Point d'Alençon en 1760. Mais la dentelle subit à partir de 1772 une crise très grave dont elle ne s'est jamais réellement relevée et la Révolution est une catastophe économique pour la dentelle. La production est ranimée par le baron Jacques Mercier, fils de Thomas, qui, vers 1830, tente de faire appliquer, sans grand succès, du Point d'Alençon sur un tulle mécanique.

Après un nouvel essor au milieu du XIXe siècle au cours duquel elle remporte un triomphe à l'exposition universelle de Londres en 1851 où "la dentelle d'Alençon est la reine des dentelles", elle est encore admirée aux expositions de Vienne en 1873, de Philadelphie en 1876 et de Paris en 1878.

Mais en 1880, le déclin commence face à la concurrence de la dentelle mécanique et son industrie cesse définitivement vers 1925. Cependant la tradition ne s'est pas perdue grâce a la fondation d'une école dentellière en 1903, et aujourd'hui la dentelle d'Alençon perdure grâce à l'existence de l'Atelier national du Point d'Alençon, créé en 1976, où une dizaine de dentellières la perpétue au titre de la "sauvegarde du patrimoine national".

Le musée des beaux-arts et de la dentelle rassemble les collections municipales de dentelles.

Technique

Le matériel nécessaire pour la fabrication de la dentelle consiste en une aiguille, du fil de lin très ténu et un support en vélin ou parchemin.

Sa technique d'exécution demande une dizaine d'étapes. Le dessin, fait à l'encre sur du papier sert à reporter sur le parchemin le contour du motif par piquage. Ce parchemin, teinté en vert pour le repos des yeux, placé sur un support, permet de faire la trace et de construire le fonds appelé le réseau. Le décor est ensuite réalisé selon différents points de remplis, mailles tortillées et serrées, puis de points ajourés, les modes. La brode, qui sertit le motif, repasse sur tous les contours du dessin. L'enlevage, l'éboutage et le régalage permettent de détacher la dentelle du support. Enfin, pour obtenir une pièce de grande dimension, il faut procéder à un assemblage invisible de plusieurs pièces. Un motif de 4cm² nécessite quinze à vingt heures de travail environ.

Extrait de Mémoire en images Alençon (Alain Champion et Yves Le Noach, Éditions Alan Sutton, 1995) et du Dictionnaire des rues et monuments d'Alençon (Alain Champion, Éditions Cénomane, 2003).