Jésuites (église des)

C'est en 1679 que la duchesse d'Alençon pose la première pierre de l'église du collège des jésuites, désignée à tort sous le nom de chapelle, et quelquefois même de chapelle Aveline, ce qui confine à l'absurdité.

Elle est caractérisée par une toiture extérieure, à l'impériale, surmontée d'un clocher coiffé d'une girouette ; quant à la toiture intérieure, elle est en forme de coque de bateau renversée. L'église est bénite et ouverte au culte en 1683, mais le gros œuvre ne sera achevé qu'en 1686 et il faudra plus de vingt ans avant l'achèvement complet de l'édifice. En 1762, les jésuites quittent la ville suite à la suppression de leur ordre. En 1793, lors de la campagne de déchristianisation et de la mise à l'écart du clergé, l'ancienne église des jésuites devient momentanément le temple de la Raison. En 1798, elle accueille un grand banquet au cours duquel les convives célébrent le cinquième anniversaire de la "Juste punition du tyran" (Louis XVI guillotiné en 1793). La même année on y place les riches boiseries de chêne sculpté de la bibliothèque de la chartreuse du Val-Dieu (abbaye près de Mortagne). En 1799, lors de l'installation de l'école centrale, l'édifice est aménagé par l'architecte Jean Delarue en deux parties : le rez-de-chaussée est transformé en théâtre et l'étage en bibliothèque pour les besoins des élèves de l'école. Cette bibliothèque, rassemblant les collections de livres qui appartenaient à différentes communautés religieuses des diocèses de Sées et de Lisieux, devient municipale en 1803 pour être accessible à tous les Alençonnais. En 1811, lors de la visite de Napoléon Ier, un grand bal est donné dans l'ancienne église des jésuites et une exposition de peinture s'y déroule en 1858.

On a conservé au premier niveau, affecté de 1873 à 1907 à un musée de sculpture, deux belles colonnes de marbre noir de Laval et des pilastres de différents marbres. Un double escalier monumental à deux rampes permet d'accéder à l'étage en passant par un palier orné de quatre bas-reliefs classés, représentant les évangélistes, provenant de l'ancien couvent des capucins d'Alençon. Les armoiries alençonnaises, sculptées sur les panneaux de la porte de chêne à deux vantaux de l'ancienne entrée, sont ornées de couronnes et de guirlandes.

L'ancienne église des jésuites, inscrite à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques, a été restaurée en 2004-2005. Après vingt mois de travaux, elle a été inaugurée le 16 avril 2005.

Aujourd'hui, le fonds de la bibliothèque municipale, l'un des plus importants de Basse-Normandie, est estimé à 100 000 volumes et le manuscrit le plus ancien est un évangéliaire du IXe siècle comprenant le texte de saint Matthieu.

 

Extrait de La bibliothèque d'Alençon (en collaboration avec Stéphane Allavena et Catherine Pionchon, Éditions Cahiers du Temps, 2006).

Photographies : Pascal Corbierre.