Notre-Dame de Lorette (chapelle)

C'est le 23 novembre 1699 que la chapelle Notre-Dame de Lorette, située aux numéros 108-110 de la rue du Mans, dans le quartier de Montsort, est fondée par Louis Sevin, ancien curé d'Ancinnes, en l'honneur de la Vierge Marie.

De la douzaine de chapelles françaises consacrées à Notre-Dame de Lorette, l'édifice alençonnais reste le seul pratiquement intact et le plus fidèle par la sobriété de sa décoration et sa simplicité austère. Louis Sevin écrit que cette construction est "si conforme à celle qu'on voit à Lorete, que ceux qui les ont vû toutes deux ne trouvent de différence dans toute la structure, que la petite Sacristie qui est du côté du Septentrion, qu'il a jugé à propos de faire ajouter pour représenter la Grote qui étoit jointe à ladite chapelle lorsqu'elle servoit de Maison à la Sainte Vierge en Nazareth".

Cette chapelle est en effet bâtie sur le modèle de celle de Lorette, en Italie, réplique de la maison de la mère du Christ, à Nazareth. Après la mort de Marie, sa demeure est aménagée en lieu de culte où les apôtres se retrouvent et célèbrent la messe. La tradition rapporte que les pierres en auraient été apportées le 9 ou le 10 mai 1291, lors de l'invasion musulmane de la Palestine, d'abord à Tersatz (Croatie), puis transportée, le 10 décembre 1294, en trois endroits rapprochés et successifs à une vingtaine de kilomètres au sud d'Ancône, dont le dernier, à la fin de 1295, est devenu Lorette. Ce nom pourrait être tiré soit des lauriers (loreto en italien) poussant à proximité, soit du prénom d'une femme demeurant dans le voisinage.

La fondation de la chapelle a été approuvée le 19 mars 1700 et érigée en bénéfice (charge spirituelle accompagnée d'un revenu) par un décret de l'évêque du Mans, car à cette époque Montsort dépendait de ce diocèse. Puis elle est bénite le 24 du même mois sous le patronage de Notre-Dame de Nazareth. Confisquée le 1er juillet 1791, elle est vendue par le Gouvernement, le 28 février 1792, à un cultivateur d'Arçonnay, pour le compte de l'abbé François de Sevin, son ancien titulaire, qui en reprend possession le 16 septembre 1795. Au début de 1796, elle fait l'objet d'une réquisition et un poste de garde y est installé ; ce doit être à ce moment que les embrasures des portes sont arrachées et que disparaît l'autel originel et la cloison intérieure. En 1826, elle est restaurée par Jeanne de Sevin, nièce de François, qui fait remettre une cloche dans le clocheton de la sacristie. Le bâtiment est alors rendu au culte et bénit pour la seconde fois, le 27 octobre, par l'évêque de Sées - Montsort ayant été rattaché à ce diocèse le 18 novembre 1805 - sous le vocable consacré par l'usage de Notre-Dame de Lorette. Cette nouvelle fondation est mise à la charge du clergé de Montsort par actes des 17 juillet 1828 et 9 mars 1829. Épargnée par les combats du 15 janvier 1871, la chapelle est associée à la basilique de Lorette par lettres patentes données à Rome le 1er août 1872, puis de nouveau rénovée et inaugurée le 11 mai 1873. La loi du 9 décembre 1905 sur la séparation des Églises et de l'État rend la Ville d'Alençon propriétaire de l'édifice qui sera inscrit à l'Inventaire supplémentaire des monuments historiques. Commencés le 12 octobre 1998, des travaux de restauration s'achèvent le 23 novembre 1999, trois cents ans jour pour jour après sa fondation et la chapelle est inaugurée le 28 avril 2000 en présence de l'évêque de Sées.

Ce lieu de culte est construit de moellons recouverts de quartzite ferrugineux violet-rouge pour rappeler le calcaire galiléen. Orienté ouest-est, il mesure environ douze mètres sur six. La façade présente un sobre chevet plat aveugle en hémicycle dont le haut pignon est décoré d'une Vierge à l'Enfant. Les deux portails qui l'entourent, accompagnés chacun d'un banc de granit, sont ornés de pilastres et de vases, et sa toiture d'ardoise, aux pentes fortement inclinées, est surmontée d'un lanternon. L'intérieur reproduit en tout point celui de la chapelle de Nazareth. Le devant d'autel est orné de deux beaux panneaux en bois sculpté du XVIIe siècle et une vaste baie permet d'apercevoir, par-dessus l'autel, une statue de Marie de la même époque, en bois peint. Notons également un Christ polychrome, peint sur bois en trompe-l'œil, datant du XIXe siècle. Faisant face à l'entrée du sanctuaire, une porte donne accès à la sacristie qui rappelle la grotte accolée à la maison de Nazareth. Cette sacristie est un petit bâtiment octogonal indépendant revêtu d'une toiture d'ardoise sur laquelle est édifié un clocheton à claire-voie dominé par une croix. L'intérieur renferme le mobilier nécessaire à la desserte de la chapelle. Dans le passage, à l'entrée du caveau, a été encastrée la pierre tombale du fondateur, décédé le 27 janvier 1712. Les successeurs de Louis Sevin, tous de sa parenté jusqu'à la Révolution, y ont également été inhumés.

 

Extrait de Alençon de A à Z (Alain Champion, Éditions Alan Sutton, 2008).